Tout comme Noël en Décembre, le Beaujolais nouveau en Novembre, le mois de mai voit débarquer la sarabande des nouveaux mots entrés officiellement dans nos dictionnaires.


"Adulescence", "divulgâcher" etc... Ces nouveaux mots du dico qui décrivent une nouvelle pensée.
Qu’est-ce qu’un mot nouveau ? C’est un mot dont on pense qu’il va vivre, qui n’est pas un effet de mode, qui est dans l’usage oral et écrit. Une langue qui n’emprunte plus est une langue morte
Bernard Cerquiglini
L’annonce des nouvelles entrées est une opération fascinante. Parce que elles fournissent un aperçu intéressant de l’évolution de notre société.
A sa manière, Le dictionnaire est donc un témoin de notre avancement. On y observe l’émergence, de nouvelles technologies, les évolutions du monde du travail ou encore la récente attention que nous portons à l’environnement.
Nouveautés lexicales, high-tech écologie bien représentées.
Cette année, les éditions 2020 du Larousse et du Petit Robert, nous annoncent chacune environ 150 entrées. Des mots comme « ubériser », « bioplastique », » fachosphère » (chez Larousse) ou « anti casseur », « microbilles », « hypersexualisation » (chez Robert), nous parlent manifestement des inquiétudes actuelles, mais aussi des bouleversements tant sociaux que techniques . On y trouve pêle-mêle des mots comme « biérologie » ou « benaise » (repus, contraction de « bien-aise« ). Comme depuis quelques 30 ans, on ne manque jamais d’y inclure quelques québécismes, comme « emportiérage » ou « divulgâcheur » (spoiler) chez Larousse, ou « malaisant » et « niaisage » chez Robert, qui en compte une demi-douzaine cette année encore.
Petit florilège de ces nouveautés, je n’ai pas mis volontairement les définitions dans le but ludique de vous les faire trouver :
Ecologie
- Bioplastique
- Dédiésélisation
Transformations technologiques
- Hackaton
- Traceur
Mutations sociétales
- Adulescence
- Antispécisme
- Locavorisme
- Sentience
- Survivalisme
Inquiétudes contemporaines
- Cyberdjihadisme
- Darknet
- Datacratie
- Fachosphère
Transformations du monde économique
- Cryptomonnaie
- Licorne (2è sens)
- Slasheur
- Smicardisation
- Ubériser
Nouvelles préoccupations sociologiques
- Bigorexie
- Bore-out
- Charge mentale
- Inclusif
Mots de la francophonie
(obligé d'ajouter les définitions)
- Alphabète (Burundi, Maroc) : Se dit d’une personne qui sait lire et écrire.
- Dagobert (Belgique) : Demi-baguette de pain garnie d’aliments froids ; sandwich.
- Divulgâcher (Québec) : Révéler prématurément un élément clef de l’intrigue d’une oeuvre de fiction ; spoiler.
- Emportiérage (Québec) : Action de percuter un cycliste en ouvrant sans précaution une portière automobile.
- Nounoune (Québec) : Un peu niais, nunuche.
- Raguiller (Suisse) : Remettre d’aplomb ; redresser.
- Sorteur (Belgique) : Personne qui aime sortir, faire la fête, fêtard.
- Taxieur (Algérie) : Chauffeur de taxi
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Quels sont les critères de sélection ?
Beaucoup d’appelés, peu d’élus. Les lexicographes français font en réalité un travail de fourmi. Pour un dictionnaire commercial normal, on est dans l’artisanat. Les mots sont recueillis par observation. Ce qui ne constitue toutefois qu’une première étape.
Chez Larousse comme chez Robert, ce sont une quarantaine de personnes qui nourrissent une base de données de 3 000 à 4 000 nouveautés relevées dans la presse, les romans, la publicité. Par la suite, un premier tri débouche sur un tableau resserré de quelque 500 noms, vocables ou expressions nouvelles. La suite — qui consiste par tradition, à réduire la sélection des 150 heureux élus. — est un peu plus obscure, car les critères dépendent largement des personnes mises à contribution.
Cependant, les critères du choix sont: un emploi fréquent, bien sûr. Pas de jargon technique, et, pour finir, pas question de céder à un simple effet de mode. Les Dictionnaires observent l’usage de la langue, pas ses caprices.
Que l’on ne s’y trompe pas. Ces nouveautés n’intéressent pas seulement le petit cercle des linguistes et des lexicographes. Car une langue, ne l’oublions jamais, ne sert pas uniquement à communiquer ni à transmettre des informations pratiques.


Si de nouveaux mots entrent chaque année dans les dictionnaires, combien en sortent ?
Alors que l’édition de 1871 du Larousse comprenait environ 35 000 entrées, 28 000 ont été ajoutées depuis, soit presque autant !
Mais, combien en sortent donc ?
« Quasiment aucun », assure Carine Girac-Marinier, qui dirige le département des dictionnaires et encyclopédies chez Larousse. « Très peu de mots ont disparu. 90 % des mots qui étaient dans le dictionnaire de 1871 sont toujours dans le dictionnaire »
Le millésime 2020 du Petit Larousse compte au total plus de 63 000 mots. Des refontes ont lieu tous les dix ou quinze ans. La dernière remonte à 2012.
Comment mieux dire : les langues vivantes… vivent
Références
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